Petites histoires
L’été enfin!

Le voilà qui s’installe dans un seul élan, faisant monter le mercure sans fioriture, l’été a fait pâlir le printemps en un rien de temps. Et franchement, nous nous réjouissons ! Parce que le printemps, c’est épuisant. Pensez, tant et tant de nouveautés, de beauté et de vitalité pour une seule saison, c’est de l’inconscience ou je ne m’y connais pas. Nous, nous avons failli y perdre la raison, en chanson.

Il y a d’abord toutes ces fleurs qui sortent du gris et de la boue sans crier gare et viennent s’offrir à votre regard au risque d’un grand éblouissement : du jaune bien sûr, jonquilles et narcisses au pied des murs, bordant les jardins, gardant les maisons, introduction lumineuse du feu d’artifices de la nature. Un peu plus tard, un peu plus haut, du bleu, du violet, du rose, lilas et glycines en plus que de vous hypnotiser de beauté vous enivrent de leurs parfums, voilà l’effluve qui réveille à jamais les corps et les cerveaux engourdis par la grisaille et la pluie. Premiers boutons de roses, brins de muguet, parterre de millepertuis font rimer nature et folie, il y a tant à regarder, toucher, sentir que l’on perd pied au milieu des pâquerettes et des pissenlits. On atterrit comme on peut, et tout à coup, on sait un peu mieux être heureux.
Épuisant, vraiment.
Au jardin, il y a toute cette terre à remuer, noire et mystérieuse, grouillante et collante, pleine de promesses. Les enfants sèment, généreusement, il faudra éclaircir. Un jardinier en herbe haut comme trois pommes entreprend une rangée de blettes et fait tomber le paquet de graines au beau milieu d’une allée. Quelques jours après, c’est une forêt de jeunes pousses serrées, tendres et vertes, qui signale le lieu de la petite maladresse. Ça pousse, aussi incroyable que cela puisse paraître, cette année encore, la vie refait son tour de magie, une seule graine suffit.

Et que dire des agneaux qui se lèvent tant bien que mal sitôt nés, des nids si pleins qui piaillent, des canetons étonnés, des lapereaux tout nus, de notre pouliche aux sabots minuscules, les naissances partout s’annoncent et signent l’insondable poésie de la vie. Moi, je regarde Java, la chienne, qui a encore le ventre bien rond. Ah, le printemps…

La chaleur vient poser un voile sur ce chef-d’œuvre insolent, la poussière fera bientôt un écran, le vert gagnera en sagesse, la maturité donnera ses fruits et nous aurons survécu à ce printemps en attendant le suivant.

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